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2020- 1

spécial panorama 2019

à propos : les ans et les jours

Définir une année ? Très facile du point de vue du scientifique : c’est le temps nécessaire à la Terre pour accomplir un tour complet autour du Soleil.
En réalité, la chose devient plus compliquée si l’on rappelle qu’il existe de calendriers lunaires , une approximation des mois sur les lunaisons. Ou encore des années dites “sidérales” de plus de 365 jours (Si on prend une direction fixe dans l’espace, la Terre mettra 365 jours 6 h 9 m 10 s pour revenir dans cette même direction). Ou même “anomalistiques” (Si on considère le point de l’orbite de la Terre le plus près du Soleil (le périgée, actuellement le 3 janvier) puisque l’orbite de la Terre est une ellipse, la Terre mettra 365 jours 6h 13m 53s pour y revenir.
Il en existe même une autre qu’on nomme “draconitique” qu’il serait un peu fastidieux de présenter ici.
A vrai dire, nous voulions simplement clamer que l’année 2019 était terminée. Et qu’en réalité, le temps n’est que relatif, il se situe dans l’horloge humaine.
Comme le disait Flaubert “Chacun de nous a dans le cœur un calendrier particulier d’après lequel il mesure le temps ; il y a des minutes qui sont des années, des jours qui marquent comme des siècles”(Lettre à Louise Colet, le 10 août 1846).
Evidemment, nous souhaitons à tous nos lecteurs des jours qui marquent comme une lumière, mais comme nous le disions, l”année 2019 s’étant écoulée, il faut bien qu’ici, dans nos pages, nous la marquions d’un sceau moins poétique et pourtant passionnant : les petites scansions de la Jurisprudence, glanées mois par mois, sorties des entrailles de l’année 2019 et le texte législatif majeur sur la réforme de l’organisation judiciaire et la procédure civile.
Ce à quoi, très brièvement, nous voulions nous atteler.
Il a fallu passer par Flaubert et l’anomalistique. Juste pour altérer l’aridité du propos et la sécheresse de la plume dans nos pages. Les détours sont toujours joyeux. Comme tous les marcheurs le savent, ils accompagnent les surprises et embellissent les moments. Et donc les années.
Bonne année 2020.

réforme de l’organisation judiciaire et de la procédure civile

Résumé. Le 1er janvier 2020, les tribunaux d’instance et de grand instance fusionnent pour créer une “porte d’entrée unique à la justice” : le tribunal judiciaire.
Promulguée le 23 mars 2019, la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la Justice prévoit que
:
- les tribunaux d’instance (TI) et de grande instance (TGI) situés dans une même commune fusionnent au 1er janvier 2020 pour former le tribunal judiciaire
- le TI situé dans une commune différente du TGI devient une chambre de proximité de ce tribunal judiciaire, appelée tribunal de proximité.

La loi n°2019-222 du 23 mars 2019 prévoyait une grande réforme de la justice, dans un souci affirmé de simplification. Et, ainsi, la mise en place du nouveau tribunal judiciaire.

Plusieurs décrets et arrêtés d’application ont suivi, notamment ceux publiés le 2 septembre -2019 (décrets n°2019-912 à 2019-914 du 30 août 2019), qui permettent aux professionnels de mieux appréhender la réforme. Ils entrent en vigueur au 1er janvier 2020,

On retiendra de cette réforme : Le recours obligatoire à un mode alternatif de règlement des litiges. L’obligation de recourir à la conciliation, à la médiation ou à une procédure participative pour tenter de régler certains litiges. Le recours à la médiation peut être enjoint par le juge, à tout moment de la procédure, de nouvelles règles sur la représentation en justice (principe: un avocat avec nombreuses dérogations).

On se limite ici à la création du “TRIBUNAL JUDICIAIRE” et à certaines REGLES DE PROCEDURE

1 - La mise en place du tribunal judiciaire.

Le décret n°2019-912 du 30 août 2019 concerne principalement le nouveau « tribunal judiciaire », remplaçant les anciens tribunaux de grande instance et tribunaux d’instance.

Il dispose : A charge d’appel d’une compétence générale d’attribution (matières n’étant pas expressément attribuées à une autre juridiction) ;
ainsi que d’une compétence spéciale dans les domaines listés dans les articles R211-3-2 et suivants du COJ (bornage, funérailles, transporteurs…)
En dernier ressort : d’une compétence spéciale dans les domaines listés aux articles R211-3-13 du COJ (litiges relatifs aux diverses formes d’électorat principalement). A charge d’appel ou en dernier ressort au regard du montant de la demande (la limite étant désormais fixée à 5.000 euros) : d’une compétence pour les actions civiles personnelles ou mobilières et d’une compétence exclusive dans les matières fixées dans les articles R 211-3-26 et R 211-3-27 du COJ (état des personnes, actes d’état civil, successions, amendes civiles des officiers d’état civil, actions immobilières pétitoires, récompenses industrielles, dissolution des associations, sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires hors commerçants et artisans, assurance professionnelles des non-salariés agricoles, droits d’enregistrement, taxes et contributions listés, baux commerciaux, inscriptions de faux, actions civiles en diffamations ou injures, contestations liées aux créances douanières, oppositions à contrainte du code du travail).

De plus, certains tribunaux judiciaires se voient confier au niveau d’un ou deux départements de compétences spécifiques. (liste). Par exemple la responsabilité médicale ou le droit de la construction en matière civile, et différents délits et contraventions sanctionnés en dehors du code pénal (code de l’action sociale et des familles, code de la consommation, code du travail…).

2 - Instances en cours

Il est prévu que les instances en cours au 1er janvier 2020 seront transférées au tribunal judiciaire ou à la chambre de proximité désormais compétents. Quant aux convocations ou assignations, deux précisions sont apportées : les actes déjà valablement signifiés aux parties devant un tribunal d’instance en vue d’une date postérieure au 1er janvier 2020 sont réputés valablement faits devant le tribunal judiciaire et n’ont donc pas à être régularisés. Cela implique que les mêmes actes qui visaient une date antérieure devront faire quant à eux l’objet d’une telle régularisation. Il est également possible dès maintenant de rédiger de tels actes en vue d’une comparution devant le tribunal judiciaire (ou une chambre de proximité), dès lors qu’ils visent une date postérieure au 1er janvier 2020.

3 - Les chambres de proximité.

Une annexe permet de déterminer le ressort et le siège des tribunaux judiciaires et chambres de proximité dans le cadre de chaque cour d’appel.
Deux autres annexes énumèrent la liste des matières entrant dans la compétence matérielle de chaque chambre de proximité et il conviendra d’être particulièrement attentif sur ce point, du fait des attributions spécifiques de certaines de ces chambres.
Les annexes suivantes déterminent les chambres compétentes en matière de déclarations de nationalité française et de certificats de nationalité française, puis celles qui se voient attribuer les questions de surendettement des particuliers et de rétablissement personnel.

3 - Procédure civile

Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile a été publié au JO le 12 décembre 2019.

Les services compétents du gouvernement ont édité, à cette occasion des textes destinés aux professionnels assez bien rédigés. On peut les consulter par un clic sur le lien ci-dessous ou le bouton :

http://www.justice.gouv.fr/justice-civile-11861/procedure-civile-au-1er-janvier-2020-documents-de-synthese-32852.html

01 - 2019. Le 31 Janvier. Référé expertise et effet relatif de la suspension de la prescription

Cour de cassation, Civ 2ème , 31 janvier 2019, n° 18-10.011

La suspension de la prescription édictée part l’article 2239 du Code Civil ne bénéficie qu’à celui qui a sollicité la mesure d’expertise et ne s’étend pas à l’ensemble des parties, lesquelles ne pourront donc invoquer à leur profit le dit délai de suspension, D’où la vigilance qui s’impose lorsque l’une des parties à la procédure epertale a l’intention, de solliciter la condamnation d’une partie qu’elle n’a pas elle-même assignée.

« Mais attendu que la suspension de la prescription, en application de l’article 2239 du code civil, lorsque le juge accueille une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès, qui fait, le cas échéant, suite à l’interruption de cette prescription au profit de la partie ayant sollicité cette mesure en référé et tend à préserver les droits de la partie ayant sollicité celle-ci durant le délai de son exécution, ne joue qu’à son profit ; »

02 - 2019. Le 14 Février. L’exclusion de la reprise de prestation dans les polices de responsabilité civile

Il est coutume de préciser que l’assureur de responsabilité garantit les dommages causés PAR la chose ou la prestation, extrinsèques et non les dommages causés A la chose ou à la prestation. C’est d’ailleurs le caractère extrinsèque ou intrinsèque des dommages qui permet de faire la distinction entre le type de dommages immatériels (autre que ceux que matériel) puisqu’aussi bien ils sont considérés comme « non consécutifs » si les dommages (matériels) sont exclusivement circonscrits à la chose ou la prestation.

Pendant une certaine période, les assureurs ont dû lutter contre une interprétation de la Cour de Cassation, laquelle, dans un mouvement de protection exacerbée de l’assuré considérait que la clause d’exclusion de la prestation « vidait le contrat de sa substance ».

Puis, la Cour a enfin décidé de la considérer comme valable.

Le débat était donc clos; Il a rejailli, ce qui a permis à la Cour de cassation de clarifier et clore définitivement (on l’espère) le débat. En énonçant dans son arrêt en date du 14 févr 2019, (Cass. 3e civ. 18-11101)
« Qu’en statuant ainsi, alors que cette clause, claire et précise, laissant dans le champ de la garantie les dommages autres que ceux résultant des malfaçons affectant les ouvrages ou travaux, est formelle et limitée, la cour d ‘appel a violé le texte susvisé ».

03 - 2019. Le 21 Mars. prescription biennale et de droit commun : la solution qui tranche

La Cour de cassation (Cass. 3e civ., 21 mars 2019, n° 17-28021) vient de trancher la question de l’articulation entre prescription biennale et prescription de droit commun. Elle écarte l’argumentation fondée sur une substitution du délai de prescription de droit commun, lorsque l’assureur ne peut opposer la prescription biennale déclarée inopposable, en jugeant, ainsi que :

« L’assureur qui, n’ayant pas respecté les dispositions de l’article R. 112-1 du Code des assurances, ne peut pas opposer la prescription biennale à son assuré, ne peut pas prétendre à l’application de la prescription de droit commun ».

Il n’est même pas question de délai butoir…

L’on ajoute qu’à l’extraordinaire obligation de copier la Loi dans les contrats d’assurance, s’ajoute, dans une logique de protection exacerbée de l’assuré, un bouleversement du droit qui évacue ici l’un de ses éléments constitutifs : le temps qui est donc effacé. De quoi donner le vertige.

04 - 2019. Le 3 Avril. La restitution du prix et l’assurance de responsabilité

L’assureur a toujours considéré, à juste raison, qu’il ne pouvait être condamné, en cas de résolution d’une vente d’un produit, à restituer un prix qu’il n’a pas perçu. Et ce même si aucune clause d’exclusion n’était prévue expressément, comme le soulignait dans son article intitulé « Le silence est d’or (à propos de l’exclusion par l’assurance de la restitution du prix à la suite d’une résolution de la vente), Mr le Professeur Groutel :
«La restitution des prestations, après la résolution, étant une exécution dans l’autre sens, le remboursement du prix ne peut jamais être réclamé par l’acheteur à l’assureur, lequel ne risque donc pas de se retrouver propriétaire de la chose restituée. La chose revient au vendeur lui-même. Le contrat d’assurance de responsabilité de celui-ci (ou du fabricant dans d’autres espèces) n’a rien à faire ici, car la restitution du prix n’est pas une dette de responsabilité”

Cependant, la question devenait rare devant les juridictions, les assureurs, échaudés, ayant pris soin de prévoir, à toutes fins utiles, ladite exclusion de la restitution du prix en cas de résolution de la vente.

Mais des vieux contrats peuvent donner l’occasion de revenir sur ce débat.

L’arrêt de la Cour de Cassation du 3 Avril 2019 (Chambre commerciale) dans un arrêt en date du 3 Avril 2019 (17-18545) met fin à toute polémique sur le sujet lorsqu’il précise que :

« Qu’en statuant ainsi, alors que la restitution du prix de vente à laquelle est condamné le vendeur à la suite de la résolution du contrat de vente pour vice caché, ne constitue pas un préjudice indemnisable, ce dont il résulte qu’elle ne constitue pas un dommage au sens du contrat d’assurance, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Nous disions, dans un bref commentaire qu’il est des jours où le juriste se délecte de la précision presque horlogère d’une locution dans un champ controversé.
C’est ici le cas.

05 - 2019. Le 29 Mai. Nécessité de la preuve concrète du défaut du produit à l’origine d’un dommage ? L’interrogation.

La question de savoir si la preuve concrète, positive, précise du défaut à l’origine d’un dommage doit être apportée ou si de simples indices concordants suffisent (le simple fait de la localisation du défaut) pour rechercher la responsabilité ou la garantie du fournisseur a toujours fait débat.
Les décisions sont contradictoires sur ce point.
On produit ci-dessous l’attendu d’un arrêt qui fait la part belle à la position dite de “l’indice par localisation”.
Suite au prochain arrêt que nous guettons sur cette matière décisive…

Cass. Civ 2, 29 mai 2019, n°17-21396

Mais attendu qu’ayant relevé que le rapport d’expertise judiciaire permettait de conclure de façon certaine que le foyer de l’incendie avait pris naissance dans une zone localisée de la chaudière et retenu que l’inflammation d’un composant de la chaudière était la cause du sinistre, la cour d’appel a pu en déduire que l’existence d’un défaut intrinsèque en relation directe avec l’incendie était rapportée, même si la nature de ce défaut n’avait pu être défini précisément et que la société Chaffoteaux avait engagé sa responsabilité pour avoir fabriqué un produit défectueux n’offrant pas la sécurité qui pouvait être légitimement attendue ;

06 - 2019. Le 13 Juin. Réparation intégrale du préjudice. Le rejet du forfait.

Certaines juridictions, pour aller vite dans leurs décisions “forfaitisent” le montant du préjudice. Ce que ne supporte pas la Cour de Cassation…

Cass. Civ 2, 13 juin 2019, n°18-17571

Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

(…) Qu’en statuant ainsi, alors que la réparation du préjudice doit correspondre à ce dernier et ne saurait être appréciée de manière forfaitaire, la cour d’appel a violé le principe susvisé ;

07 - Le 4 juillet - Pas d’analyse de garantie en référé. La règle et l’effet pervers

Le juge des référé, juge de l’évidence, ne peut ni ne doit analyser la garantie d’un assureur, contestés, qui requiert ainsi une interprétation. L’arrêt dont l’attendu est reproduit ci-dessous, le rappelle.
Etant cependant observé que certains juges, font application de cette règle, dans le cadre d’un “référé- expertise” (demande de désignation d’un expert judiciaire), en ne mettant pas hors de cause, immédiatement, l’assureur, alors que la non-garantie est “évidente”. En considérant que s’agissant d’une question de fond, le juge saisi ultérieurement après dépôt du rapport statuera et qu’ainsi l’assureur attendra et devra subir l’expertise; que le juge n’a pas à apprécier la garantie…
C’est le cas typique de la règle à “effet pervers” : elle se retourne facilement.

Ici, la Cour avait interprété et tranché….

Cass. Civ 2, 4 juillet 2019, n°17-10278

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a interprété la notion de réclamation conjointe et tranché une contestation sérieuse quant à la portée de la garantie litigieuse, a violé le texte susvisé

08 - 2019. Le 29 Aout. Le tacle, la faute, le risque

La question de la faute et des risques est considérée comme l’une des plus commentées sur les bancs des facultés de droit. La notion d’acceptation des risques a, en effet, généré des milliers de pages des juristes.
Elle devient moins centrale mais réapparait de temps à autre pour ce qui concerne le jeu sportif.
Il n’est pas inutile de suivre l’évolution de la jurisprudence en la matière tant il est vrai que ce support (le “risque”) peut être utile ailleurs.
Donc un. arrêt qui précise la règle.

Cass. Civ 2, 29 août 2019, n°18-19700

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle retenait l’existence d’une faute grossière au sens de la circulaire 12.05 de juillet 2011 de la Fédération française de football, c’est à dire une violation des règles du jeu caractérisée par un excès d’engagement ou la brutalité d’un joueur envers un adversaire « lorsqu’ils disputent le ballon quand il est en jeu », et qu’une telle faute, qui excède les risques normaux de ce sport, était de nature à engager la responsabilité de M. M…, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé

09 - 2019. Le 19 Septembre. Pas de clause d’exclusion évasive ou allusive dans le contrat d’assurance : la notion de règles de l’art.

Les clauses d’exclusion dans les contrats d’assurance doivent être formelles et limitées. A vrai dire claires et ne pas être génératrices d’interprétation.
Le cas de l’exclusion de l’inobservation des règles de l’art a fait couler beaucoup d’encre d’imprimerie.
Elle est, majoritairement, considérée comme trop évasive.
C’est le cas dans l’arrêt dont un extrait (lui, extrêmement clair) est reproduit ci-dessous

Cass. Civ 3, 19 septembre 2019, n°18-19616

Attendu que, pour rejeter la demande de garantie de la société Perret contre la société Gan, l’arrêt retient que la clause d’exclusion est claire et précise, que l’ensemble de la charpente métallique n’est pas conforme aux règles de l’art, du fait du sous-dimensionnement de ses pièces et d’une mauvaise conception de certains de ces constituants et que ces anomalies manifestes constituent de la part d’une société spécialisée une inobservation consciente et délibérée des règles de l’art, telles que définies par l’expert à défaut de normes en la matière

Qu’en statuant ainsi, alors que la clause d’exclusion visant les dommages résultant d’une méconnaissance intentionnelle, délibérée ou inexcusable des règles de l’art et normes techniques applicables dans le secteur d’activité de l’assuré ne permettait pas à celui-ci de déterminer avec précision l’étendue de l’exclusion en l’absence de définition contractuelle de ces règles et normes et du caractère volontaire ou inexcusable de leur inobservation, la cour d’appel a violé le texte susvisé

10 - 2019. Le 3 Octobre. Contrat d’assurance de biens en Europe et juridictions compétentes. Validité de la clause de compétence de la juridiction du lieu de situation du bien s’il ne s’agit pas d’une assurance obligatoire

Cass. 1re civ., 3 oct. 2019, no 18-20286

En application de l’article 15, 4), du règlement (UE) n° 1215/2012 les conventions attributives de juridiction peuvent être librement conclues par les assureurs européens avec un assuré domicilié dans un État tiers, sauf s’il s’agit d’une assurance obligatoire ou qui porte sur un immeuble situé dans un État membre

Une société établie en Andorre ( donc hors Union européenne), avait conclu un contrat d’assurance avec une société d’assurance établie en France.

Le contrat contenait une clause attributive de juridiction exclusive au profit des tribunaux andorrans pour connaître des litiges opposant l’assureur à l’assuré domicilié sur le territoire de la Principauté d’Andorre, relatifs à l’immeuble situé sur ce territoire. Un litige étant survenu, l’assuré a cependant assigné l’assureur en France, devant le Tribunal de commerce de Paris dans le ressort duquel est le siège de l’assureur français. Ce dernier a soulevé une exception d’incompétence territoriale en invoquant la clause attributive de juridiction.

La cour d’appel de Paris rejette le contredit formé aux fins d’application de clause d’élection de for en Andorre stipulée aux termes de la police d’assurance et infirme la décision du tribunal de commerce de Paris qui s’était déclaré incompétent en retenant l’exception de connexité en application de l’article 101 du Code de procédure civile . Son arrêt est cassé par la décision précitée du 3 Octobre.

En effet, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une assurance obligatoire et que l’assurance porte sur un immeuble qui n’est pas situé dans un État membre de l’Union européenne mais en Andorre, la convention attributive de juridiction pouvait valablement déroger aux dispositions du règlement en application de l’article 15, 4) de ce dernier.

11 - Le 21 novembre - L’étendue de la responsabilité décennale de l’architecte

L’architecte engage sa responsabilité (décennale). Il s’agit d’une présomption. Et il aura beaucoup de mal à s’exonérer.
La rédaction lapidaire, presque définitive de l’extrait de l’arrêt reproduit ci-dessous, en atteste…

Cass. Civ. 3, 21 novembre 2019, n°16-23509

Mais attendu qu’ayant retenu, à bon droit, que M. A…, auteur du projet architectural et chargé d’établir les documents du permis de construire, devait proposer un projet réalisable, tenant compte des contraintes du sol, la cour d’appel, qui a constaté que la mauvaise qualité des remblais, mis en oeuvre avant son intervention, était la cause exclusive des désordres compromettant la solidité de l’ouvrage, en a exactement déduit, sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, que M. A… engageait sa responsabilité décennale

Attendu que M. D… fait grief à l’arrêt de retenir sa responsabilité décennale et de rejeter sa demande d’exonération de responsabilité

Mais attendu qu’ayant relevé que la mission de M. D… consistait en une étude des fondations de l’immeuble et retenu qu’il ne pouvait pas invoquer à son profit une quelconque cause d’exonération de sa responsabilité, la cour d’appel a pu en déduire, sans inverser la charge de la preuve, que sa responsabilité était engagée sur le fondement de la garantie décennale

12 - 2019. Le 13 Décembre, un revirement de jurisprudence sur les conditions d’exonération de la responsabilité de la SNCF

Une voyageuse, munie d’un billet valable se trouve dans le compartiment d’un train bondé. Une porte se ferme automatiquement qui écrase le pouce de la voyageuse
Le transporteur, assigné sur le fondement de l’art 1147 du Code Civil et l’obligation de sécurité de résultat lui incombant, évoque la jurisprudence consacrée,
rendue au visa de l’ancien article 1147 du Code civil : le transporteur ferroviaire est tenu envers les voyageurs d’une obligation de sécurité de résultat et ne peut s’exonérer de sa responsabilité contractuelle qu’en invoquant la faute d’imprudence de la victime si cette faute, quelle qu’en soit la gravité, présente les caractères de la force majeure (Cass. 1re civ., 13 mars 2008, n° 05-12551, Cass. ch. mixte, 28 novembre 2008, n° 06-12307).
Cependant, le droit européen modifie cette donne puisqu’en effet, aux termes de l’article 11 du règlement CE n° 1371/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007, sans préjudice du droit national octroyant aux voyageurs une plus grande indemnisation pour les dommages subis, la responsabilité des entreprises ferroviaires relative aux voyageurs et à leurs bagages est régie par le titre IV, chapitres I, III et IV, ainsi que les titres VI et VII de l’annexe I du règlement n° 1371/2007.

Et selon l’article 26 de l’annexe I du règlement précité, le transporteur est responsable du dommage résultant de la mort, des blessures ou de toute autre atteinte à l’intégrité physique ou psychique du voyageur causé par un accident en relation avec l’exploitation ferroviaire survenu pendant que le voyageur séjourne dans les véhicules ferroviaires. Il n’est déchargé de cette responsabilité que si l’accident est dû à une faute du voyageur.

Ces dispositions du droit de l’Union, entrées en vigueur le 3 décembre 2009, sont reprises à l’article L. 2151-1 du Code des transports, lequel dispose que le règlement précité s’applique aux voyages et services ferroviaires pour lesquels une entreprise doit avoir obtenu une licence conformément à la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen.

Dès lors, le transporteur ferroviaire peut s’exonérer de sa responsabilité envers le voyageur lorsque l’accident est dû à une faute de celui-ci, sans préjudice de l’application du droit national en ce qu’il accorde une indemnisation plus favorable des chefs de préjudices subis par la victime.

Ici, la cour d’appel d’Aix-en-Provence, avait fait droit aux demandes de la passagère, en retenant que l’article 11 du règlement pose un principe général de responsabilité du transporteur ferroviaire au-dessous duquel les États membres ne peuvent légiférer, ainsi qu’un principe de droit à indemnisation.

La cour d’appel a confirmé le jugement, en ajoutant que l’article 26, § 2, b), de l’annexe I, qui n’envisage qu’une faute simple du voyageur, est de nature à limiter la responsabilité du transporteur et, par suite, l’indemnisation du voyageur au regard du droit interne français, plus exigeant sur les conditions d’exonération du transporteur ferroviaire. Elle en conclut que seul l’article 1147 du Code civil, dans sa rédaction susmentionnée trouve à s’appliquer.

Arrêt cassé. Et revirement de jurisprudence, la Cour de Cassation décidant que les dispositions du règlement européen doivent recevoir application, la cour d’appel les ayant violé.

EXTRAIT ARRET 11 décembre 2019 (18-13.840)

Il en résulte que le transporteur ferroviaire peut s’exonérer de sa responsabilité envers le voyageur lorsque l’accident est dû à une faute de celui-ci, sans préjudice de l’application du droit national en ce qu’il accorde une indemnisation plus favorable des chefs de préjudices subis par la victime.

Il y a lieu, en conséquence, de modifier la jurisprudence précitée.

Pour accueillir les demandes de Mme X…, l’arrêt retient que l’article 11 du règlement n° 1371/2007 pose un principe général de responsabilité du transporteur ferroviaire au-dessous duquel les Etats membres ne peuvent légiférer, ainsi qu’un principe de droit à indemnisation. Il ajoute que l’article 26, § 2, b), de l’annexe I, qui n’envisage qu’une faute simple du voyageur, est de nature à limiter la responsabilité du transporteur et, par suite, l’indemnisation du voyageur au regard du droit interne français, plus exigeant sur les conditions d’exonération du transporteur ferroviaire. Il en conclut que seul l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, trouve à s’appliquer

En statuant ainsi, alors que les dispositions du règlement devaient recevoir application, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 21 décembre 2017, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence

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Janvier 2020

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